Campagne choc

Le tourisme cynégétique

Le tourisme cynégétique    

Ces scènes vous choquent ? Vous n’aimez pas ? Tant mieux ! Pourtant, il fut un temps, pas si lointain, où elles semblaient normales. Nous aimerions croire que le racisme, la haine de l’autre et la condescendance du Nord envers le Sud sont chose du passé, mais il n’en est rien.

L’extrême droite prolifère toujours aujourd’hui, les partis nationalistes gagnent du terrain un peu partout dans le monde, le fanatisme religieux devient la norme comme en atteste l’apparition des affiches Civitas sur les campus (« contre la dictature démocratique »). Ces idéologies redeviennent « normales ». On ne s’étonne plus de voir les Lepen au second tour des présidentielles françaises, des millions d’Américains voter Trump, la Hongrie ou la Pologne glisser vers l’autocratie, la Flandre se demander si l’on peut gouverner avec l’extrême droite… On finit par ne plus oser parler religion par peur. Ces faits sont-ils plus ou moins choquants que ces vieilles photos ?

Nous aimerions croire qu’il est préférable de fermer les yeux sur ces dérives autoritaires et d’en faire de simples faits divers, mais cela revient à banaliser ce type d’actes destructeurs et infamants.

Au Service Volontaire International, organisation de jeunesse, nous considérons qu’il est essentiel de porter un regard critique aussi bien sur notre présent que notre passé, car comme l’affirmait Churchill, « un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre ». Nous n’oublions pas.

Le racisme, le fascisme et l’obscurantisme ne doivent pas devenir des banalités !

Qu’ils sont beaux. Qu’ils sont forts. Après avoir fièrement lutté dans un combat acharné entre l’Homme et l’animal, leur fougue et leur panache ont fini par leur offrir la victoire.

Ils l’ont eue.

La bête.

Celle qu’ils traquaient depuis des heures sous le soleil ardent de la savane. Celle pour laquelle ils ont investi plusieurs milliers d’euros. Ils vont maintenant pouvoir rentrer chez eux et accrocher au mur sa tête, ses cornes, sa peau, ou n’importe quelle partie de son cadavre qu’ils jugeront esthétiquement agréable. Voilà de vrais hommes comme on en fait plus. Des gagnants !

Cela n’étonnera personne si nous annonçons que la chasse aux trophées est une activité controversée. Pourtant, elle reste très pratiquée dans de nombreux pays. Voyons ensemble en quoi consiste ce loisir particulier et ce qu’il peut apporter (en mal ou en bien) aux populations locales et au monde animal.

Le principe est le suivant : des chasseurs (généralement occidentaux) partent pour l’Afrique et payent de grandes quantités d’argent pour avoir le droit d’abattre un animal « exotique » et ramener sa carcasse à la maison. Les sommes peuvent aller d’une petite centaine d’euros pour un babouin, à près de 40.000 euros pour un lion ou un éléphant. Nous nous penchons ici sur le cas particulier de l’Afrique, car il nous semble être le plus parlant, mais le tourisme cynégétique (= relatif à la chasse) est présent sur tous les continents (par ex. : chasse à l’ours au Canada, etc.). Les animaux les plus prisés sont ceux du Big Five : le lion d’Afrique (Panthera leo), l’éléphant de savane d’Afrique (Loxodonta africana), le buffle d’Afrique (Syncerus caffer), le rhinocéros noir (Diceros bicornis), et le léopard d’Afrique (Panthera pardus). Toutes parmi celles-là, excepté le buffle, sont des espèces menacées.

Mais à en entendre les défenseurs des trophy hunts (chasses aux trophées), cette pratique serait en réalité bénéfique pour ces mêmes animaux. En effet, selon eux, les sommes payées par les chasseurs pour abattre un animal serviraient justement à financer des campagnes de préservation et de réinsertion des espèces en voie d’extinction. Par la même occasion, cet argent serait aussi injecté dans l’économie du pays et serait très profitable aux populations locales qui vivent souvent sous le seuil de pauvreté.

Difficile de démêler le vrai du faux. La réalité n’est en effet pas si simple : de nombreux rapports d’études attestent que ce secteur est particulièrement corrompu et que la part effectivement reversée aux communautés locales et aux actions de préservation des animaux est minime. Au Cameroun, par exemple, la part reversées aux populations locales ne s’élève qu’à 3% du total engendré par ce secteur. En Zambie, les communautés locales ne sont pas propriétaires des terres de chasse et ne reçoivent donc, elles aussi, qu’un tout petit pourcentage des revenus. Un rapport de la Humane Society International indique notamment qu’en Afrique du Sud, au Botswana, en Éthiopie, au Mozambique, en Namibie, en Tanzanie, en Zambie et au Zimbabwe, le tourisme cynégétique ne contribue que très peu à l’économie intérieure de ces pays. Le tourisme régulier fournirait 132 fois plus d’emplois que la chasse aux trophées.

Quant aux bénéfices de la chasse sur la préservation des espèces menacées, il semble également prudent d’en douter. Beaucoup se souviennent de Cecil, un lion du Zimbabwé abattu par un dentiste américain en 2015. Cet animal était suivi par une équipe de chercheurs de la Wildlife Conservation Research Unit de l’université d’Oxford. Précisons tout de même, et c’est important, que le chasseur en question était un braconnier. Or, l’un des principaux arguments avancés par les défenseurs du tourisme cynégétique est que la chasse légale finance justement la lutte contre le braconnage.

Parlons donc du braconnage. Certes, il y a un gouffre, sur les plans écologique et économique, entre la chasse aux trophées et le braconnage. Certes, on peut considérer que la chasse légale offre aux braconniers une alternative moins risquée, et les incite donc à chasser de manière plus « raisonnée » et respectueuse des lois. Mais plusieurs associations animalières réfutent cet argument en affirmant que la légalisation (et donc la banalisation) de la chasse aux trophées ne fait qu’augmenter la demande d’ivoire, de cornes et de « viande de brousse », conduisant alors, paradoxalement, à une augmentation du braconnage et du trafic (évalué à 20 milliards de dollars par an). Cette hausse semble toutefois avoir connu un pic en 2011, année à partir de laquelle la tendance se stabilise, voire régresse.

N’oublions pas non plus que les bêtes les plus chassées sont généralement les plus grosses et les plus en forme. Ce sont donc celles qui présentent les meilleurs gènes qui se font davantage tuer. Tout l’inverse de ce que fait normalement la sélection naturelle. Ainsi, on constate que le poids moyen des mouflons d’Afrique est passé de 85 à 65 kg entre 1975 et 2005, et la taille de leurs cornes est passée de 70 à 50 cm. De plus en plus de femelles éléphants n’ont plus de défenses.


En résumé, tous ces arguments n’apportent pas de réponse claire et définitive à cette situation aux enjeux difficiles. Quelle est selon vous la meilleure solution pour lutter contre l’abattage et l’extinction des espèces en danger ? Pensez-vous que le tourisme cynégétique soit une bénédiction pour les animaux menacés, ou au contraire un fléau ?

Nous sommes le Service Volontaire International. Nous cherchons à inciter les gens à développer un regard nouveau et critique sur le monde, à travers le volontariat. En tant qu’Organisation de jeunesse accréditée par la Fédération Wallonie-Bruxelles, notre mission est de former des CRACS : des citoyens responsables, actifs, critiques et solidaires.

Protégez la nature !

Sources :